Les Cévennes au cœur

Eugène CARLES

Jeudi 28 Août 2014

Le 28 août 1914, Eugène CARLES mourrait des suites de ses blessures, au Lazaret de Fribourg en Allemagne où il était prisonnier. Il allait avoir 23 ans. C’est le 3ème soldat Bréaunais mort pour la France au cours du 1er mois d’un conflit qui s’annonce meurtrier.


Ce qu’on sait de lui

Eugène CARLES
Il était orphelin de Jules CARLES et de Marie MAURIN, né le 3 septembre 1891 à Valleraugue. Son tuteur, Eugène MAURIN, peut-être un oncle était lui aussi domicilié à Valleraugue. A noter que sur le monument aux Morts de Valleraugue figurent Elie CARLES et Albert MAURIN qui étaient peut-être ses parents. Célibataire, il résidait à Bréau où il était cultivateur. L’extrait de son registre matricule nous dit qu’il avait les cheveux châtain foncé, les yeux châtain ardoisé, le front vertical moyen, le nez busqué relevé moyen, le visage plein et les sourcils très amincis. Il mesurait 1m 53.

Ne sachant ni lire ni écrire, il devait sans doute s’exprimer plus naturellement en occitan qu’en français (degré d’instruction générale =  0 sur une échelle allant de 0 à 5. ( 0 = ne sait ni lire ni écrire – 1 = sait lire – 2 = sait lire et écrire – 3 = sait lire, écrire, compter – 4 = a obtenu le brevet de l’enseignement primaire – 5 = bachelier, licencié etc…).

Il était de la classe 1911, sous le n° de matricule 2455.

Son parcours militaire

Départ pour la guerre du 99e RI
Départ pour la guerre du 99e RI
En 1912, au conseil de révision, il est ajourné pour « faiblesse », mais reconnu « bon pour le service » en 1913. Il est incorporé comme 2ème classe dans le 3e bataillon, à la 9e compagnie du 99e RI à compter du 10 octobre 1913.

Le 99e RI dont les casernements se situaient à Lyon et à Vienne (Isère) appartenait à la 55e Brigade de la 28e Division d’Infanterie dépendant du 14e Corps d’Armée.
 
Le régiment est commandé par le Lt-Colonel MARTINET, le 3e bataillon par le Commandant SOUBEYRAN, la 9e Cie par le Capitaine VALLADE assisté du Lieutenant POUCHON  et des S/Lieutenants MONOT et MOREAU. A la déclaration de guerre, il comprend 3234 hommes et 213 chevaux.

La lecture du Journal de Marche et des Opérations (JMO) nous renseigne sur les déplacements, les cantonnements et les engagements que va connaître Eugène CARLES au sein du 99e RI jusqu’ à sa mort.

Dès les 6 et 7 août 1914 le régiment se dirige sur sa base de concentration à l’est d’Épinal. Le trajet s’effectue en chemin de fer (390 kms environ). Le 3e Bataillon, celui d’Eugène CARLES cantonne à Docelles à 15 km à l’est d’Épinal.

A partir du11 août des éléments du 99e RI qui tiennent les cols du Bonhomme et de Sainte-Marie sont en contact avec l’ennemi. Cantonnements à Bruyères et Laveline.

Le 12 août étape vers St-Léonard (21 kms).

Le 13 août le 3e Bataillon est à Lesseux (16 kms).

Le 14 août reconnaissance pour déterminer un emplacement de batterie de 75.

Le 15 août, à partir de 17h30 1er engagement, fusillade jusqu’à la nuit. Le 3e Bataillon et l’Etat-Major bivouaquent dans le Bois du Trapèze.

Le 16 août, les allemands battant en retraite, le régiment progresse, le 3e Bat cantonne à Sainte-Marie aux Mines (13 kms).

Le 17 août, le 3e Bat prend position au Col d’Urbeis (20 kms par la route).

Le 18 août, étape vers Blancherupt (23 kms).

Le 19 août, ordre de marcher sur Waldesbach, Bellefosse et Belmont distants de quelques kilomètres. Départ à 14h, nuit sur place. Pertes de 10 S/Officiers et 176 Soldats.

Le 20 août, ordre de rester sur les positions conquises. Le 99e RI perd 8 S/Officiers et 168 hommes, le Capitaine VALLADE commandant la 9ème Cie est porté disparu. En fait, blessé il a été fait prisonnier.

Le 21 août, même ordre que la veille, le 1er Bat perd son commandant, 1 Capitaine, 1 Lieutenant et 153 Soldats.

Le 22 août, le 3e Bat échange des coups de feu avec l’infanterie allemande à 900 m. Pertes de la journée (2e et 3e Bat) 28 hommes.

Le 23 août, ordre de retraite sur Saulxures (13 kms).

Le 24 août, combat dans le brouillard, le 3e Bat est pris entre les feux de l’ennemi et ceux du 256e RI. Les pertes sont terribles. Le Lt-Colonel MARTINET commandant le régiment est tué, ainsi que le chef du 3e Bataillon le commandant SOUBEYRAN. Les S/Lieutenant POUCHON et MOREAU de la 9ème Cie sont blessés. Le régiment perd 40 S/Officiers et 960 Soldats… Ordre de retraite, le 3e Bat cantonne à Laitre (17 kms).

Le 25 août, re-formation hâtive du régiment, retraite en combattant. Pertes 3 Officiers, 220 S/Officiers et Soldats.

Le 26 août, puissante attaque allemande, les 3 Bataillons se replient en arrière du Col de la Culotte (7kms 500). Arrivée de renforts, combats confus dans les bois et reprise à la baïonnette du Col. Pertes 3 Officiers et 180 Hommes.

Le 27 août, violente attaque allemande, les 99e, 75e, 30e RI et 62 BCP sont rejetés sur Saint-Dié qui est abandonnée. Pertes 25 Hommes.

Le 28 août, échec d’une contre-attaque sur Saint-Dié,  qui ne sera reprise par l’armée française que le 11 septembre 1914. Le régiment reçoit 352 Hommes en renfort.

Les documents consultés, ne permettent pas de déterminer à quelle date, Eugène CARLES, blessé a été fait prisonnier par les allemands. Le fait qu’il ait été évacué sur Fribourg en Allemagne (120 kms environ), laisse à penser qu’il a vraisemblablement été capturé dans un délai minimum de 2 à 3 jours avant la date de son décès, le 28 août. Peut-être au cours de la terrible journée du 24 où le régiment en retraite a perdu plus de 1000 Hommes. A noter que selon l’historique du régiment, le 99e RI à perdu au cours de la guerre 3196 Hommes soit la quasi intégralité de son effectif, au déclenchement des hostilités.

Le contexte : les batailles de Lorraine

Prisonniers Français à Sarrebourg
Prisonniers Français à Sarrebourg
Après l’échec de l’offensive française sur Morhange et Dieuze, où périt Alban MONTEILS, les allemands veulent exploiter leur succès et menacer la droite de l’armée française. Il attaqueront au centre, sur la Trouée de Charmes et Rozelieure, puis sur les ailes, Saint-Dié et le Grand Couronné (Nancy). Bien que très éprouvées par les premiers combats, les troupes de la 1èreArmée, commandées par le Général DUBAIL et celles de la 2èmeArmée commandées par le Général de CASTELNAU, parviendront de justesse à stopper l’offensive et empêcher l’invasion de l’est de la France. La victoire de la Marne mettra un terme provisoire aux combats sur cette partie du front. C’est au cours de ces batailles défensives qu’est tombé Eugène CARLES.

Décédé en captivité

Nécropole Nationale des prisonniers de guerre 1914-1918
Nécropole Nationale des prisonniers de guerre 1914-1918
Il a pu être blessé et fait prisonnier sur le terrain entre le 19 août, date des premières pertes du 99e RI et le 26 août (2 jours pour son évacuation semblant un délai limite). Toujours est-il, qu’il est décédé des suites de ses blessures au Lazaret de Fribourg (Freiburg im Breisgau) le 28 août 1914, il a dû se sentir bien seul… L’acte de décès a été transcrit à Valleraugue le 8 septembre 1916.

Il repose bien loin de ses Cévennes natales, dans la Nécropole Nationale des prisonniers de guerre 1914-1918 tombe n° 11113 parmi 13 220 de ses camarades. Cette nécropole a été créée en 1922, au Nord-Ouest de Sarrebourg sur la D 27 – Elle rassemble les corps de prisonniers de guerre exhumés des cimetières provisoires de camps disséminés sur le territoire allemand et rapatriés en France.
 
 
Si vous aviez en votre possession des documents concernant Eugène CARLES  et que vous souhaitiez les partager pour nous permettre de compléter cette brève biographie, merci de prendre contact  ici : contact@breau-salagosse.fr

Pour en savoir plus :
http://neuf-neuf.pagesperso-orange.fr/index_b.htm
http://chtimiste.com/batailles1418/lorraine.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Fronti%C3%A8res

Sources :
Les travaux de Christiane GERBAL – Mémoire sur les  Morts pour la France de Bréau et Salagosse.
Le site : www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr